Passion Rando 53 - La Réunion

F aut-il vraiment sortir de la voiture? Sur le parking sous le col des Bœufs, des convois de nuages pleurent un crachin tiède et poisseux qui ramollit les jarrets. Capuche ajustée et poings au fond des poches, on finit par se décider. Mafate est le plus tourmenté, le plus isolé des trois cirques qui creusent le nord de l’île, impres- sionnante arène issue des jeux pyrotechniques du piton des Neiges. Ce n’est décidément pas un temps pour les hélicos. Au col, une plaque rappelle le crash d’André Bègue en mai 2010. Ce fut le premier pilote à avoir désenclavé Mafate. Il faisait pourtant beau ce jour-là, mais le pilote stagiaire à ses côtés a eu la mauvaise idée de couper l’arrivée d’essence alors que l’appareil s’élançait dans le vide. Notre descente vers la plaine des Tamarins se fait plus en douceur, au rythme des tortillons du sentier. un monde retranché des turbulences Bientôt, le rideau de brume se déchire et laisse apparaître une forêt d’arbres tordus aux longues barbes de lichens. Le tamarin des Hauts, acacia endé- mique de La Réunion, est un arbre des plus photogé- niques. Passé le plateau où il prend ses aises, c’est la dégringolade vers l’îlet –le « t » se prononce– de La Nouvelle, le plus récent de ces hameaux perchés dans des endroits impossibles. Depuis l’éclosion des téléphones portables, le facteur n’est plus le seul lien avec l’extérieur. L’isolement n’en gouverne pas moins le quotidien. Lorsqu’on habite Mafate, mieux vaut aimer la marche à pied. Le cirque est un monde clos, un univers rassurant et réconfortant. «Nos ouvriers ont étudié la faisabilité d’une route jusqu’à La Nouvelle, mais les habitants n’en veulent pas », précise Bernard Labrosse, le référent sentier de l’ONF. Son équipe de 150 ouvriers, recrutés dans les différents îlets, travaille d’arrache-pied à l’entre- tien des sentiers, menacés en permanence par les éboulements, la boue ou la végétation envahissante. Les pentes sont fortes et les lacets peu nombreux. La plupart ont été tracés par les « Nègres marrons » qui, traqués par les chasseurs d’esclaves, tâchaient de faire au plus court pour rejoindre d’inaccessibles refuges. Tout au fond de la gorge, le chemin fran- chit la rivière des Galets sur une élégante passerelle –encore un ouvrage de l’ONF– avant la longue re- montée vers le col des Bœufs. Les marches chauffent les cuisses! Pour en faire moins, les ouvriers avaient en effet reçu pour consigne de les façonner avec une hauteur minimum de 25 cm…

Boucle dans le Haut-Mafate à la journée Difficile 15 km 6 h + 900 m/- 900 m Balisage Point GPS : 21 06197°S - 55.44971°E

Départ : depuis le parking du Petit Col, à 10 km au sud-ouest de Grand-Ilet par les D52 et la route forestière du Haut-Mafate. En route ! ¶  Au bout du parking (gardé et payant, 3 €), passer la barrière, emprunter la piste jusqu’au col des Bœufs. ·  La descente commence. ¸  Le chemin s’aplanit dans la plaine des Tamarins. ¹ Bifurquer à droite sur le sentier vers La Nouvelle et traverser l’îlet. º Continuer à descendre vers la rivière des Galets. »  Le sentier étroit

864m

se faufile en bord de falaise. ¼  Traverser la passerelle Ethève, puis traverser le Bras Massine et, un peu plus loin, à nouveau la rivière des Galets à gué. ½  Remonter vers la plaine des Tamarins par de raides escaliers. Forte pente. ¹ On retrouve le chemin de l’aller. Remonter jusqu’au col des Bœufs, puis descendre jusqu’au parking.

PASSIon RAndo automne 2019 45

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